Nous partageons cette tribune signée Cyril Tramon, Président Fondateur de WeShareBonds.
Véritable fierté nationale, le secteur agroalimentaire pourrait bénéficier d’une conjoncture porteuse. Toutefois, le sous-investissement chronique du secteur l’empêche aujourd’hui d’en profiter. Si la révolution de l’économie participative, en l’occurrence le crowdfunding, a été bénéfique à certains secteurs d’activité en France depuis plusieurs années, l’agro-alimentaire n’a pas su la mettre à profit.
Tandis que le Salon de l’Agriculture vient tout juste de fermer ses portes, faisons un rapide état des lieux sur ce secteur central pour la France. Si sa part dans l’économie française a diminué de moitié depuis 1980, l’agroalimentaire y occupe, indéniablement, une place fondamentale. Il constitue en effet le premier secteur industriel tant en chiffre d’affaires qu’en nombre d’emplois. Par ailleurs, il a une importance primordiale dans l’aménagement des territoires et constitue un contributeur net dans le solde des échanges extérieurs de la France. Cependant, la situation semble se dégrader depuis quelques années. Et pour cause ; le secteur agricole, pour la première fois depuis trente ans, présente un solde déficitaire de ses produits agricoles bruts.
De fait, l’agriculture est confrontée à de nombreux défis dans les secteurs de l’élevage, des céréales ou des produits laitiers. Alors que la baisse des cours mondiaux s’inscrit dans une tendance de long terme, la France fait face à un triple défi : la taille et la modernisation des exploitations sont insuffisantes, tandis que la concurrence internationale s’est accrue ; d’autant plus depuis 2013 avec la fin des quotas qui ont longtemps joué un rôle protecteur. Mais si la France a vu son poids relatif diminuer, elle ne doit pas pour autant occulter la bonne image et la réputation d’excellence des produits agroalimentaires à l’export.
Selon l’ANIA, au regard des évolutions passées, du retard d’investissement cumulé et des besoins unitaires des entreprises, un besoin de financement de l’ordre de 27 milliards d’euros à horizon de 5 ans permettrait aux IAA françaises de répondre à ces enjeux, tout en se rapprochant des performances observées en Allemagne (depuis 2013, l’investissement en bien d’équipement a progressé de 50% en Allemagne, contre un recul de 2% en France) . Ce sous-investissement chronique empêche aujourd’hui le secteur de profiter de la reprise actuelle et des perspectives offertes par la demande étrangère.
Remonter la filière en créant une communauté fidèle n’est pas suffisant
Face à une grande distribution souvent pointée du doigt, de nombreuses initiatives commerciales ont adopté une stratégie de remontée de filière (à l’image du développement en vol d’oies sauvages des pays asiatiques dans les années 1980), couplée à un positionnement alternatif souvent bio et qualitatif, en misant sur l’esprit communautaire. Par exemple, La Ruche qui dit oui offre des débouchés plus directs à des producteurs et des artisans. Véritable intermédiaire sous forme d’interface informatique, elle met en relation les producteurs et les consommateurs via un responsable local de ruche. Au global les intermédiaires se partagent une commission inférieure à 20%. Autre exemple de consommacteur : la marque de lait C’est qui le patron distribuée en grandes surfaces. Elle propose au client de fixer et d’accepter un prix minimum plus élevé permettant aux producteurs de réaliser un profit acceptable.
Toutefois, si ces initiatives s’intéressent surtout aux circuits de distribution et au marketing, elles ne peuvent malheureusement pas couvrir l’ensemble des problématiques plus larges d’exploitation, d’investissement et de financement (crédits de trésorerie, crédits professionnels).
Le crowdlending/crowdfunding : agir en amont, financer la structuration de l’offre
Il est bon de rappeler que la gastronomie française est inscrite depuis 2010 au patrimoine mondial de l’Unesco. L’agroalimentaire draine d’ailleurs un bon nombre d’autres secteurs : arts de la table, tourisme, électroménager, etc. Sa bonne santé est donc essentielle pour les secteurs agricole et agroalimentaire français qui représentent la principale origine des produits transformés, elle-même plébiscitée par les consommateurs.
Comme le révélaient les derniers chiffres du Trésor, ce sont les entreprises particulièrement innovantes qui profitent des perspectives importantes à l’export (et 70 % d’entre elles ont ainsi innové au préalable). Afin de maintenir cette compétitivité, il est nécessaire de pouvoir dégager les ressources pour investir, moderniser nos outils de production et ainsi assurer la différenciation des produits français.
Dans ce contexte, le crowdfunding via un crédit professionnel ou un crédit de trésorerie peut jouer un rôle central en permettant aux particuliers d’investir en direct dans les entreprises qu’ils souhaitent soutenir. Cette opportunité d’investissement est d’ailleurs compatible avec un rôle de potentiel consommacteur. Le crowdlending est adapté que ce soit pour financer les besoins en BFR, les investissements industriels, mais également les actifs immatériels : recrutements, marketing, prospection, Recherche & Développement. En avril 2017, WeShareBonds a ainsi participé au financement des Cidres Premium, pour soutenir son développement international. L’objectif d’une telle démarche ? Encourager cette filière d’excellence, tout en répondant aux attentes évolutives des consommateurs et en assurant la conquête de nouveaux marchés pour la France.