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« Chez Lidl, on réfléchit Made in France »

élue en 2016 enseigne préférée des consommateurs dans la catégorie grandes surfaces alimentaires, Lidl développe depuis trois ans une stratégie valorisant la production française. Michel Biéro, co-gérant de Lidl France travaille notamment au développement de contrats tripartites, signés entre l’enseigne, les industriels et les producteurs, qui permettent notamment à ces derniers de valoriser leur savoir-faire.

Nous avons rencontré Michel Biero, co-gérant de Lidl France, qui a bien voulu répondre à nos questions.

Depuis trois ans, Lidl développe le Made in France dans son offre ?

Quand on déménagé notre siège de Strasbourg à Paris, en 2013, nous avons pris la décision de créer une centrale d’achat made in France et de nous appuyer sur des productions françaises, étant donné que la demande des consommateurs est de plus en plus forte vis-à-vis de ces produits. Aujourd’hui, chez nous, on réfléchit Made in France, 365 jours dans l’année.

Pourtant, cela collait pas vraiment à votre image ?

Nous étions même considérés comme des 100% made in Germany, avec une image de méchant hard discounter allemand. Pourtant, depuis des années, nous vendons des produits français. Pour transformer notre image, nous avons donc activé deux leviers, celui de la communication et surtout, de l’accélération de notre stratégie Made in France, d’une part parce que cela répond à la demande du consommateur, d’autre part parce qu’on est fier d’être français. Nous nous revendiquons comme une entreprise française à part entière. Nous avons 1 500 magasins français, 25 000 salariés français et aujourd’hui 75% de produits français dans notre offre. Sur le lait, nous sommes passés de 82 % à aujourd’hui 100 % de production française. Et sur la viande, de 60 à 98 %. Dans la charcuterie, le taux atteint 55 % contre 7 %, il y a encore deux ans.

Vous avez notamment signé des contrats avec les producteurs ?

Nous avons exposé sur le salon de l’Agriculture en 2015 dans l’objectif de rencontrer le monde agricole. Petit à petit, nous avons noué des relations. C’est essentiel de mettre les producteurs dans la boucle, quitte à déranger les industriels…

Le fait d’inclure les éleveurs dans nos contrats est l’une des solutions pour sortir de la crise que le monde agricole traverse. Si on perd les éleveurs, que va-t-on manger ? Il faudra se tourner vers les autres pays pour acheter. Ce serait idiot. Autrement dit, je demande à l’éleveur le prix auquel je dois lui payer son kilo de porc, par exemple, pour qu’il puisse vivre décemment de son travail. Et je m’engage à lui payer ce prix, selon une certaine durée que l’on a convenu ensemble.

Ensuite, j’explique à l’industriel qu’entre le prix du producteur et mon prix de vente, il me reste telle somme, que nous devons nous partager. Tous nos achats étant centralisés, nous sommes effectivement obligés de travailler avec les industriels, qui préparent le produit, l’emballent, le livrent sur palettes, sauf dans le cas des fruits et légumes, où nous achetons en direct à la production. Jusqu’à présent, on discutait le bout de gras avec l’industriel et ce dernier donnait des miettes aux éleveurs. Aujourd’hui, chacun y met un peu de sa poche et tout le monde y est gagnant car au final on vend plus de produits. Nous avons retrouvé la confiance du consommateur. Sur l’emballage, nous indiquons au consommateur que le porc qu’il achète, non seulement, est français, mais a été élevé dans telle région et que les éleveurs en photo, sont ceux qui nous livrent du porc pour lui. Et lorsque nous ne pouvons travailler avec un industriel français, nous jouons la transparence avec le consommateur. Nous disons que le Ch’ti porc est né et élevé dans le Nord-Pas de Calais, abattu et transformé en France ou en Belgique.

Cette démarche concerne les autres filières ?

Mon rêve est de développer cette démarche sur la totalité du lait, du boeuf et du porc.

Pour les éleveurs, le fait que 100 % de nos volumes de porcs frais français relèvent de contrats tripartite ne suffit pas puisque cela ne concerne pas l’ensemble de l’animal. Dans les Hauts de France par exemple, nous allons développer, avec un industriel, la saucisse de Lille, du pâté, du jambon… Ainsi, 80 % des 2 800 porcs que nous achetons s’appuieront sur des tripartites et personne ne touchera au prix convenu. En ce qui concerne les volailles, nous commençons les discussions sur les oeufs. Pour le boeuf, une tripartite a démarré dans le charolais et nous continuons nos efforts pour valoriser au mieux la viande française et la grande variété de ses races.

Dans les autres secteurs, nous ne trouvons pas forcément de groupements d’éleveurs et d’industriels qui soient d’accord pour faire un tripartite. Dans le lait, nous ne pourrons aller au-delà de 20 % des volumes sous tripartite. Les deux mastodontes en France, Lactalis et Sodiaal, n’en veulent pas. Mais nous avons développé avec la Laiterie de Saint-Denis-de- l’Hôtel une tripartite qui fonctionne très bien. Les éleveurs sont contents. Ils ont une visibilité sur le long terme.

Vous avez également organisé une collecte pour les éleveurs ?

Après la crise agricole, la distribution a mis beaucoup d’argent sur la table que les producteurs n’ont jamais eu. Nous avons donc créé un fonds pour venir en soutien aux éleveurs français. Une collecte de 3 centimes sur chaque litre de lait vendu, destiné à tout l’élevage français, a ainsi été mise en place. On vend 300 millions de litres de lait par an, c’est le produit qu’on vend le plus. En six mois, 4 millions d’euros ont été récolté. Une goutte d’eau certes mais un pavé pour dire que l’on peut faire quelque chose pour le monde agricole. Si tout le monde s’y mettait, nous aurions facilement cent millions d’euros. La MSA (Mutualité sociale agricole) a défini une liste d’éleveurs qui recevront ainsi 2 000 euros en fin d’année.

Et pour le reste de l’assortiment ?

Sur la gamme Saveurs de nos régions, nous avons aujourd’hui déjà plus de 110 produits. Nous travaillons de plus en plus avec des regroupements de producteurs locaux, comme Saveurs en nord, Fruits et légumes d’Alsace, Sud de France… C’est une gamme permanente les magasins de la région concernée et ailleurs, quatre fois dans l’année, nous mettons en place une thématique régionale dans toute la France. En revanche, Produits de Bretagne ne veut pas travailler avec nous, au prétexte qu’on ne fait pas 50 % de marques nationales. Nous ne commercialisons certes que 10 % de marques nationales, ce ratio ne bougera pas. Et pour continuer à travailler avec nous, ces marques nationales doivent faire aussi du 100 % made in France.

Ces produits français partent aussi à l’export ?

Oui, c’est déjà le cas. Le vin notamment. On achète aujourd’hui près de 60 millions de bouteilles de vin par an. Cela représente environ 10 % de la production de la région bordelaise. Lidl France achète pour les 10 000 magasins Lidl en Europe.

Ce taux de 75 % peut encore augmenter ?

On pourra peut être aller jusqu’à 78 ou 80 %. On est déjà à 98 % dans la viande, mais sur certains morceaux comme la bavette ou le mignon de porc, la demande est supérieure à l’offre. Mécaniquement, il faut aller en chercher ailleurs. Et sur des produits comme les shampoings, la lessive, les achats sont groupés sur l’ensemble de l’Europe. C’est une entreprise de cosmétiques allemande qui nous fournit. Le consommateur est aussi moins regardant sur l’origine de ce type de produits.

Les vendeurs sont sensibilisés à cette démarche ?

Oui, sur notre intranet, le salarié peut voir tout ce qui se passe dans l’entreprise. Si je signe le matin à 9 h dans une ferme un accord tripartite avec un éleveur, à 9h10, toute la France Lidl peut être au courant. Et sur le Salon de l’agriculture, nos meilleurs ambassadeurs sont nos salariés. Qui mieux que nos salariés pour parler de Lidl sur le stand ? Pour ceux qui veulent être ambassadeurs, nous avons organisé un petit jeu dans chacune de nos 25 directions régionales, avec à chaque fois cinq gagnants. Cela fait donc au total 125 ambassadeurs.

Vous avez mesuré l’impact de cet engagement sur vos ventes ?

Quand on regarde aujourd’hui notre croissance, elle est impressionnante. Mais elle est liée à l’ensemble des mesures que nous avons prises depuis trois ans qui concernent aussi la modernisation des magasins, la formation des salariés, la publicité… Nous avons gagné beaucoup de clients.

Par Sabrine Moressa

Rédacteur(rice) magazine et web

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